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Quelques mots sur l’actualité des soins palliatifs

Dr Maria Fernanda DELGADO CORTES | médecin cheffe de clinique adjointe en soins palliatifs, RHNe
Dr Indira AMORIM ARAUJO | médecin-cheffe de service de soins palliatifs, RHNe
Dr Christian BERNET | médecin chef de l’équipe mobile de soins palliatifs - BEJUNE

SNM News ¦ Quelques mots sur l’actualité des soins palliatifs  - N°111

La recherche sur l’utilisation de substances psychédéliques en fin de vie

Les soins palliatifs offrent un soutien holistique pour les patients atteints de maladies graves ou en phase terminale, ainsi que pour leur famille et leurs proches aidants. La prise en charge comprend des traitements médicaux pour soulager la douleur, d'autres symptômes somatiques, du soutien psychologique et spirituel.  Cependant, malgré l’utilisation de tous les traitements habituellement disponibles, certains patients continuent de souffrir de douleurs physiques, de dépression, d'anxiété et d’angoisse de mort imminente, une situation décrite comme détresse psycho-existentielle ou « total pain ». Jusqu’à présent, face à une situation réfractaire des symptômes multiples, la sédation est une solution palliative de dernier recours. C'est pourquoi l'utilisation de substances psychédéliques, telles que la psilocybine et le LSD, intéressent de plus en plus la recherche d’alternatives pour aider les patients en fin de vie à soulager ces symptômes.

L’emploi des substances psychédéliques comme l’acide lysergique (LSD) et la psilocybine ont été étudiées en médecine depuis les années 60. Au vu des différents tabous culturels et des interdictions d’usage, les recherches sur ces substances ont été mises de côté. Depuis 2010 elles font l’objet des recherches dans des différents domaines, notamment la psychiatrie, dans les troubles anxiodépressifs et le syndrome de stress post-traumatique, avec des résultats encourageants.

Le LSD est une substance psychédélique, classée comme une drogue illicite dans la plupart des pays, y compris en Suisse. Bien qu'elle puisse être utilisée dans un contexte médical contrôlé pour la recherche, l’utilisation thérapeutique reste encore controversée. Il existe des études en cours sur l'utilisation du LSD en tant que traitement complémentaire pour les patients en soins palliatifs. Pour le moment, les résultats ne sont pas concluant au point d’imaginer une utilisation thérapeutique sur les années qui viennent.

La psilocybine, quant à elle, est un composé psychoactif présent dans des champignons hallucinogènes. Son potentiel thérapeutique en médecine est également un sujet de recherche. Des essais cliniques récents ont montré que la psilocybine peut être efficace pour traiter l'anxiété, la dépression et d'autres troubles psychiatriques chez les patients atteints de cancer. En outre, les effets psychédéliques de la psilocybine peuvent aider les patients à vivre des expériences spirituelles et à réfléchir à leur vie, leur mort et leur sens de l'existence.

En conclusion, l'utilisation de substances psychédéliques pour les patients en fin de vie en Suisse est en cours d'étude et peut représenter une approche intéressante pour des patients sélectionnés présentant des symptômes réfractaires. Bien que ces substances puissent potentiellement aider les patients à soulager la douleur, l'anxiété et la dépression, il est important que leur utilisation soit strictement réglementée et encadrée par des professionnels de la santé qualifiés pour assurer la sécurité des patients. Les soins palliatifs en Suisse continuent d'évoluer pour mieux répondre aux besoins des patients en fin de vie, et l'utilisation de substances psychédéliques peut être une option de traitement prometteuse à explorer dans le cadre d'une approche holistique et centrée sur le patient.

Gestion de la douleur neuropathique et emploi de la Méthadone comme co-analgésie

La gestion de la douleur est une partie cruciale de la gestion des symptômes en soins palliatifs. Les opioïdes sont une arme importante dans la bataille contre la douleur. De par sa puissance, ses possibles effets secondaires et de son potentiel d’addiction, cette arme peut être délétère si son utilisation est mal maitrisée.

La méthadone est un médicament opioïde synthétique pouvant être utilisé pour soulager la douleur, y compris la douleur neuropathique. Elle fonctionne en se liant aux récepteurs μ (mu), par son énantiomorphe L et un effet anti-NMDA par son énantiomorphe D.

La méthadone est fréquemment choisie en raison de sa durée d'action prolongée (mais qui reste variable selon les individus) et en raison d’une voie d’administration simple (elle peut être administrée par voie orale, sous-cutanée ou intraveineuse). Les métabolites inactifs de la Méthadone sont éliminés par les selles, rendant son utilisation possible en cas d’insuffisance rénale.

Dans le cadre des douleurs cancéreuses avec composante neuropathique, elle est utilisée depuis quelques années, dans la médecine palliative comme co-analgesique, à petites doses, en association avec l’opioïde conventionnel déjà présent. Elle peut également aider à réduire la tolérance aux opioïdes ainsi que les symptômes de sevrage chez les patients qui ont été précédemment traités avec d'autres médicaments opioïdes.

La méthadone a par ailleurs des effets sur d'autres neurotransmetteurs, tels que la noradrénaline et la sérotonine, qui sont impliqués dans la modulation de la douleur et de l'humeur.

Comme tous les opioïdes, la méthadone peut avoir des effets secondaires, notamment une sédation excessive, une constipation, une rétention urinaire, des nausées et des effets cardiotoxiques par allongement du QT. Il peut aussi y avoir un risque de dépendance ou d'abus, surtout chez les personnes qui ont des antécédents de dépendance aux opioïdes. Sa principale difficulté d’utilisation est liée à son très fort potentiel d’interactions médicamenteuses.

En conclusion, la méthadone peut être une option efficace pour soulager la douleur neuropathique chez les patients en soins palliatifs, notamment ceux souffrant d’une insuffisance rénale pour qui l’utilisation d’autres médications est contrindiquée.

Son utilisation requiert de l’expertise et doit être soigneusement surveillée et ajustée par le spécialiste en fonction de la balance risque-bénéfice, afin de minimiser les risques.

Kétamine et trouble dépressif sévère

La kétamine est un anesthésique et antalgique très puissant dérive de la Phéncyclidine (PCP), elle est utilisée depuis longtemps en médecine palliative, à des doses moindres qu’en anesthésie, pour des douleurs réfractaires et/ou à composante neurogène ou pour contrer une tolérance aux opiacés. Elle peut aussi aider à soulager d'autres symptômes courants, tels que l'anxiété et la dyspnée. Les données actuelles évoquent comme mécanisme d’action un blocage des récepteurs N-méthyl-D-aspartate (NMDA) en augmentant la libération de certains neurotransmetteurs, tels que la noradrénaline et la dopamine.

Son utilisation nécessite une surveillance accrue et une expertise au vu des effets psycho-mimétiques secondaires importants (hallucinations, dysphorie, confusion, sentiment de dépersonnalisation…)

Nous retrouvons dans la littérature des études récentes qui ont mis en évidence l’action positive de la kétamine dans la dépression sévère. Contrairement à d’autres antidépresseurs, l’effet positif d’un bref traitement à la kétamine s’est manifesté presque immédiatement et s’est prolongé plusieurs semaines après l’administration. La littérature sur ce sujet devient abondante en psychiatrie. Les données actuelles sont encore limitées en médecine palliative et des études sont en cours. Il est important de noter que cet effet rapide, contrairement à d’autres antidépresseurs, trouve un intérêt tout particulier pour le traitement en fin de vie, où le temps est limité, et des voies d’administration parentérales sont parfois nécessaires pour faire face à la dépression.

Références :

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